FICHE DE POSTE
Le
Gouvernement Français a lancé un Plan de relance de 100 milliards
d’euros pour redresser durablement l’économie française et créer de
nouveaux emplois. L’objectif visé est de transformer une économie fortement
handicapée par le COVID-19 en investissant prioritairement dans les
domaines les plus porteurs et faire en sorte que la France puisse retrouver son
niveau économique d’avant crise dans deux ans.
L’économie française est
caractérisée par de nombreuses vulnérabilités. Taux de croissance, en moyenne
inférieur à celui des autres pays européens, prélèvements obligatoires élevés,
balance commerciale structurellement déficitaire, taux de chômage élevé,
dette sur PIB de l’ordre de 98,1 en 2019 et qui devrait progresser à 120%
d’après les estimations de la Cours des comptes, budget de l’Etat
régulièrement en déficit. A cela s’ajoute une désindustrialisation
évidente liée à des déficits de compétitivité et de productivité, à des
insuffisances en matière d’innovation et recherche développement, sans oublier
la faiblesse dans l’intégration verticale des filières, la forte
dépendance vis-à-vis de l’extérieur sur les consommations intermédiaires, et
l’érosion de parts de marchés à l’export exacerbée par l’arrivée de
nouveaux acteurs notamment asiatiques sur les marchés internationaux qui
viennent compléter une situation économique préoccupante.
La pandémie est venue aggraver
la situation difficile de l’économie française avec ses chocs psychologiques
sur les Agents économiques, des dépenses sanitaires exceptionnelles non
programmées, les effets négatifs des mesures de confinement sur de
nombreux secteurs, et des pertes de débouchés à l’export dans un contexte de
ralentissement de l’économie mondiale
C’est dans ce contexte
qu’intervient le plan de relance qui s’articule autour de trois axes
touchant à l’écologie, à la compétitivité et à la cohésion. Des
mesures y sont ciblées comme la rénovation thermique des bâtiments,
l’aide à la décarbonisation de l’industrie, la transformation du secteur
agricole, la recherche et l’innovation pour le développement de technologies
vertes, la baisse des impôts de production, l’investissement massif dans les
technologies d’avenir (technologies vertes), le renforcement du soutien à la
recherche, la formation, la valorisation des savoir-faire nationaux
existant, le Ségur de la santé etc…
Ce plan qui s’apparente à un plan d’ajustement structurel n’est
pas de notre point de vue la bonne réponse face à la crise pour plusieurs
raisons.
Premièrement, les mesures ciblées ont plutôt un impact sur le
moyen et long terme au regard de leurs délais de mise en œuvre Or,
compte tenu des risques de précarisation, de la population française du fait de
la pandémie Il faut sans doute à la France un plan de redressement économique
et financier à court terme dont les effets immédiats permettent de maintenir
l’emploi et les revenus et de booster le moral des acteurs. Les
mesures d’ajustement structurel de l’économie française ciblées dans le plan de
relance devraient à notre avis être traitées dans le cadre des canevas
budgétaires et de planification existants bien entendu avec la possibilité de
prévoir des mesures d’accélération.
Deuxièmement, la mise en
œuvre d’un plan requiert une analyse lucide des contraintes
internes et externes et des opportunités et menaces de l’environnement. Sur ce
point, la contrainte extérieure de la France est telle que ses 10 premiers
partenaires économiques, qui concentrent les deux-tiers de ses échanges,
européens majoritairement avec l’Allemagne en tête avec 17%, et la Chine font
face à des risques prononcés de récession économique en 2020. Ensuite,
les préoccupations budgétaires liées à des moins-values réelles de recettes
fiscales (66 milliards d’euro escomptés en 2020) et les mesures nouvelles de
réorientation des crédits vers des secteurs sociaux consécutives à la
gestion de la pandémie créent à coup sûr des effets d’éviction sur les projets
en cours d’exécution dans certains secteurs de soutien à l’économie. Sans
oublier l’exacerbation inévitable du déficit public évalué par l’INSEE à
3% du PIB en 2019 qui pourrait passer à plus de 11% en 2020.
La relance semble aussi
difficile en tenant compte des pertes de pouvoirs d’achat liées à la
recrudescence du chômage, aux mesures de confinement qui ont freiné le rythme
de travail notamment chez les commerçants, les artisans, les chômeurs, les
ouvriers et les travailleurs, à revenus modestes sans possibilité de
télétravailler. Autant de facteurs qui vont forcément avoir des incidences sur
la consommation des ménages. D’après le baromètre CSA/Cofidis, quatre Français
sur dix se disent financièrement affaiblis par la situation dans le pays.
Enfin, du côté de l’investissement, le sentiment de se projeter dans un avenir
incertain du fait de la pandémie justifiera des attitudes évidentes de
précaution chez les investisseurs domestiques et étrangers malgré des taux
d’intérêts négatifs. Les Banquiers centraux européennes en actionnant sur les
leviers classiques de politique monétaire confondent une situation normale à une
situation d’extrême crise. Ils auraient dû être plus imaginatifs en
proposant d’autres mesures quitte à sortir temporairement du dogme monétaire de
lutte contre l’inflation inspiré par l’Économiste Milton Friedman.
En outre, les politiques de
relocalisation systématique d’activité industrielles mal pensées ne sont pas
une solution pour des raisons évidentes liées aux problèmes de compétitivité
que rencontre l’économie française.
Au regard de ce qui précède, il
faudrait sans doute à la France un Plan de redressement à court terme axés sur
des résultats immédiats. Dans cette nouvelle stratégie qui semble plus
pertinente, Il faudrait de nouveaux paradigmes face à une situation économique
d’exception : il convient de sortir des logiques classiques tendant à miser
sur la création systématique d’emplois par des entreprises mais à repenser
profondément les dogmes en termes d’emplois et de mobilité professionnelles. Il
conviendra de dérouler des programmes massifs d’infrastructures publiques
notamment dans la santé, les ’économie d’énergie et les travaux d’intérêts
publics pour donner des revenus, et relancer la consommation. Il s’agira aussi
d’œuvrer en faveur de politiques visant à mieux gérer l’existant afin de
réaliser des économies, mener des réformes d’urgence salutaires pour prioriser
les dépenses, désinvestir s’il le faut, annuler les postes budgétaires non
prioritaires, relire les contrats en cours afin de bien gérer les
contentieux mais aussi recapitaliser les entreprises à fort potentiel
disposant de perspectives réelles de croissance.
il est aussi pertinent de trouver des partenariats gagnant -gagnant
avec des zones à forte croissance comme l’Afrique dans le cadre de
véritables politiques industrielles de complémentarités.
Sur le plan de l’endettement enfin
la France pourrait demander à ses créanciers la restructuration de son
endettement afin de le rendre plus soutenable et disposer de plus de manœuvre
budgétaire. Bien entendu, en accord avec ses partenaires européens elle devrait
aussi concomitamment développer un plaidoyer en faveur du déplafonnement
temporaire de certains critères du Pacte de stabilité et de croissance.
Bien entendu dans la mise en
œuvre du plan, il faudra rapidement réfléchir à un mécanisme institutionnel
efficient capable de contourner les rigidités de l’Administration publique.
Magaye GAYE
Economiste
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