Avec ce
pragmatisme légendaire qui a toujours marqué ses activités religieuses, l’Imam
de la grande mosquée de la pointe Nord de l’île de Saint-Louis, Cheikh Tidiane
Diallo, a prononcé un sermon de 15 minutes, pour attirer l’attention des
fidèles musulmans sur les nombreux enseignements que nous pouvons tirer de la
célébration de l’Aïd El Kébir (la grande fête du mouton).
Il a exhorté
les fidèles à s’inspirer constamment de l’entente, du consensus, de la
compréhension mutuelle, qui avait marqué d’une pierre indélébile, les relations
intrinsèques d’interdépendance que le Prophète Ibrahim, son épouse et leur
fils, Ismael, entretenaient, tout en jouant parfaitement et respectivement les
rôles de « pères et époux vertueux », « d’épouse fidèle et
citoyenne », « de fils soumis à la volonté de son père ». De
l’avis de l’Imam Cheikh Diallo, les fidèles doivent s’inspirer régulièrement de
« cette entente historique, qui a été à l’origine de l’acte que le
Prophète Ibrahim avait posé, conformément aux recommandations divines, pour
sacrifier son fils », pour refaire la société, corriger les défauts
constatés dans notre société, éradiquer les pratiques malsaines et autres maux
qui ne cessent de gangréner notre société. Il a déploré avec la dernière
énergie, le fait que certains musulmans éprouvent le plaisir de dépenser 1
million Cfa pour acheter un simple bélier, au moment où ils pouvaient utiliser
cet argent pour aider une quinzaine de fidèles à avoir un mouton. Pour l’Imam
Cheikh Diallo, le musulman fervent doit savoir que « si Dieu lui donne
assez de moyens pour lui permettre d’être à l’abri des contraintes financières
et sociales, il doit en même temps, avoir le réflexe de sauver son prochain, de
mettre son prochain à l’abri du besoin, d’aider les pauvres, les démunis et
autres indigents ». En développant cet argumentaire, l’Imam du Nord de
l’île a voulu tout simplement inviter, à travers des anecdotes, des métaphores
et des paraboles, les musulmans, « à développer les vertus de l’altruisme
pour corriger de manière durable les imperfections notées dans les relations
entre les croyants, pour mettre définitivement un terme à certaines tares de
notre sociétés, etc ».
Il a ainsi
plaidé pour la générosité, pour la redistribution des ressources, des
richesses, pour le partage des biens matériels et financiers détenus par
certains fidèles musulmans, par la grâce de Dieu. L’Imam a surtout invité ses
coreligionnaires à éviter de « remplacer Dieu par l’argent, par ces fameux
billets de banque qui couvrent les agissements de ceux qui sont extrêmement
riches, extravagants, qui vivent dans un luxe insolent, qui mènent un train de
vie mondain, qui chahutent leurs propres parents, leurs voisins, amis et
sympathisants, qui passent tout leur temps à mentir et à commette des péchés, à
humilier, rabaisser, torturer et vexer les pauvres. Nous devons aussi éviter de
jeter notre dévolu sur un riche pour lui donner la main de notre fille, tout en
oubliant de nous assurer que ce dernier est un fidèle croyant, un musulman
exemplaire, pieux, honnête, sincère, constant dans sa démarche, reconnaissant
et loyal. Car, nous pouvons toujours tomber dans le piège mortel d’un
prétendant à la langue mielleuse, qui donne une apparence trompeuse, « qui
n’est en réalité qu’un prétentieux, qu’un escroc, qu’un bandit de grand chemin,
prêt à détruire, à disloquer toute une famille ».
L’Imam Cheikh
Diallo nous invite aussi à nous méfier de ceux qui sont très jaloux et très
contents, « s’ils se rendent compte que leur prochain est gravement
malade, qu’il n’arrive plus à survivre, à payer ses factures d’eau et
d’électricité, que sa famille est finalement réduite à la mendicité ».
Ces gens sont
très proches de nous et passent tout leur temps à nous souhaiter du mal, à nous
calomnier, nous discréditer. Ce sont ces mêmes personnes qui nous côtoient dans
les grandes mosquées au moment de la grande prière du vendredi, qui nous
regardent d’un « mauvais œil » et qui n’hésitent pas « à nous
saluer chaleureusement » après la prière, à nous serrer la main, à nous
tenir des propos bienveillants. Ces mêmes individus sont prêts à nous tresser
des lauriers devant le public et attendre que nous nous éloignions, pour jeter
l’opprobre sur nous et notre famille. C’est un péché impardonnable.
Du fait de ces
comportements, de ces crocs-en-jambe, de cette dégradation sociale, de cet
effondrement de la moralité, la pluie tardera à tomber. S’adressant ensuite à
la presse, l’Imam a insisté longuement sur la nécessité de s’inspirer des
qualités d’El Hadj Malick Sy, de Cheikh Ahmadou Bamba et de l’ensemble de nos
guides spirituels, pour nous ranger définitivement dans l’adoration d’Allah,
pour vivre enfin dans la famille élargie et non dans une famille nucléaire
(mode de vie des occidentaux).
Il a
rendu un vibrant hommage au président Macky Sall, qui a eu l’amabilité de poser
la première pierre du projet de réhabilitation de cette grande mosquée du Nord
de l’île. L’Imam a, enfin, invité les autres fidèles musulmans à apporter leurs
contributions à la réhabilitation de cet édifice qui fait partie des monuments
historiques de la ville tricentenaire de Saint-Louis.
Mbagnick
Kharachi Diagne/Chroniques.sn