Quand j’écoute Ousmane Sonko, ou le lis dans la presse,
comme dans les deux ouvrages qu’il a publiés ces temps derniers, je me mets à
croire que cet homme politique – c’est rare dans notre espace public pour être
souligné – a certainement fréquenté des ateliers de média-training, en vue
d’une parfaite maîtrise de sa communication pour en faire un atout dans la
construction et la diffusion de son projet politique. Nul ne saurait lui
contester cette approche de faire la politique.
Sauf peut-être pour souligner que dans son optique, il privilège une méthode
qui rappelle sur certains points et à bien des égards, une vieille technique de
propagande qui a été portée au summum de son art au cours des années 30 et 40.
Certains spécialistes de la communication politique peuvent être tentés
d’assimiler sa façon de construire son discours de propagande à celle que l’on
nomme la stratégie de mise sous hypnose du peuple.
Cette méthode repose essentiellement sur un travestissement translucide et
systématique de la réalité observée.
Un travestissement translucide monumental qui est élaboré à partir d’un ou de
plusieurs faits réels autour du ou desquels on effectue astucieusement une
montagne de contrevérités.
Aussi, par ce biais, tente-t-il d’émerveiller et d’embastiller les consciences
mais aussi d’embrigader des opinions, par la posture affichée et par l’énormité
des choses dites.
Il a encore fourni une preuve manifeste lors de sa dernière conférence de
presse au cours de laquelle il a parlé de l’or de la Falémé.
Comme dans un scénario de film fantastique, il porte toujours à son
paroxysme l’invraisemblable.
Il joue avec un désarmant aplomb sur la naïveté, l’ignorance et sur la
crédulité supposées d’une opinion publique encore en formation, en vue de
produire des effets politiques massifs auprès de cette même opinion
publique.
Sur un a priori parfois trompeur il se laisse convaincre que ses cibles
principales accepteront de renoncer, volontairement ou involontairement à user
de la raison critique.
Dans un ouvrage publié en 1937 à Paris, Münzenberg, un homme d’Etat et
intellectuel allemand nous a expliqué ce que signifie : «la propagande en tant
qu’arme en politique».
On se rappelle que dans les années 30, un idéologue européen était devenu un
véritable virtuose de cet instrument de propagande qu’est devenue la
radiodiffusion.
Il avait fini de bien expliquer quelle était l’importance de la radio dans la
propagande : « Je considère la radio comme le moyen de conditionnement des
masses le plus moderne et le plus important qui soit ». Apparemment,
Ousmane Sonko utilise des codes et méthodes similaires pour avoir
avec lui les masses.
Aujourd’hui, le discours politique construit par lui et ses partisans, veut
faire sonner dans l’oreille de certains citoyens l’idée que le politicien
Ousmane Sonko signifie la bonne gouvernance, la transparence et la
droiture.
Voire ! Et comme pourrait dire l’autre, « l’Internet est le moyen de
conditionnement des masses le plus moderne et le plus important qui soit
».
Pour en revenir au mode opératoire de la propagande de Sonko, on peut observer
dans le dernier épisode qu’il livre dans sa série fantastique sur les
ressources naturelles du pays, qu’il part d’un fait réel ; l’existence d’un
mémorandum d’entente pour ouvrir des négociations qu’il confond volontairement
avec un contrat signé en bonne et due forme.
Il en arrive ainsi à dire des contrevérités qui peuvent faire frissonner
certains esprits simples et soulever leur indignation.
Face aux contrevérités sorties par Ousmane Sonko, le directeur général de la
société du fer de la Falémé rétablit la vérité.
« Sur les 750 millions de tonnes de réserve de
fer sur lesquelles Ousmane Sonko prétend disposer de documents qui indiquent
que l’Etat a signé un contrat avec Tosyali, Amadou Camara dément l’honorable
député, en précisant : « Ousmane Sonko parle de la totalité des réserves
de fer de la Falémé.
Il confond le contrat signé avec Arcelor Mittal qui était basé sur la totalité
des réserves et celui en cours de négociation avec les turcs avec qui nous
négocions sur 1,5 millions de tonnes par an, portant au plus, un 10ème des
réserves de la Falémé, pour un total de 70 080 millions tonnes de fer pour une
durée de 25 ans».
Par ailleurs, le Dg de la MIFERSO indique, pour la bonne information du public,
que le contrat dont a parlé Ousmane Sonko au cours de sa conférence de presse,
signé le 18 octobre 2018, n’était en réalité qu’un protocole d’accord, signé en
vue d’ouvrir des négociations.
Il précise également, conformément aux pratiques habituelles observées dans le
cadre de négociations commerciales et économiques, vingt (20) points formulés
comme demandes par la partie turque devaient faire l’objet d’accords
définitifs, en vue de la signature d’un contrat minier entre les deux
parties.
Aujourd’hui, précise Amadou Camara sur les vingt points négociés seuls neuf (9)
ont fait l’objet d’un accord définitif entre les parties.
Tous les avantages fiscaux et autres demandés par les turcs au cours des
négociations seront naturellement traités dans le cadre des lois et règlements
qui organisent et assurent la gestion des investissements au Sénégal, en
particulier les textes relatifs aux Zones économiques spéciales et le Code
minier.
Sur un autre registre qui conforte celui du DG
de la MIFERSO, le Directeur général de l’APIX, Mountaga Sy explique de façon
simple ce que l’Etat a fait avec la partie turque : « l’Etat a signé avec la
société turque Tosyali une convention promoteur-développeur (…) il s’agit pour
la société turque disposant d’un statut de promoteur-développeur, de faire la
promotion de la zone économique pour développer la chaîne de valeur dans le
domaine de l’unité de fabrication de sidérurgie, d’autre part de développer en
y faisant installer plusieurs autres unités industrielles et d’entreprises
diverses».
M. Sy poursuit ses explications : dans le démenti opposé à Ousmane Sonko, il souligne
: «développer une zone économique spéciale dans le sens de la loi sénégalaise
implique l’idée que c’est le promoteur qui prend en charge entièrement le
financement du développement de la Zone. L’engagement de l’Etat au plan
financier est totalement exclu.
Il n’en est rien pour la prise en charge des frais liés aux prêts financiers et
autres garanties ».
M. Sy note, par ailleurs, qu’il n’est pas question, contrairement aux
prétentions du député Ousmane Sonko, de donner un permis à la société turque
pour lui réserver une quelconque exclusivité pour l’achat de la ferraille
produite au Sénégal. Dans cette affaire il est facile de prouver l’amalgame
dans le discours de Sonko et de mettre en évidence la volonté du député de
propager des contrevérités.
Il omet volontairement de citer, pour le bénéfice de l’opinion publique, les
dispositions pertinentes des articles du MOU 4 et 5. Il s’est pourtant fondé
sur ce même MOU pour tenter de tromper les citoyens. Cet article
4 précise que : « Les stipulations du présent MOU ne constituent pas un
engagement ferme et irrévocable des parties de réaliser le projet ni de
conclure quelque accord spécifique que ce soit.
En outre, aucune stipulation du présent MOU ne confère à une partie le droit
d’engager l’autre partie.
Jusqu’à ce qu’un contrat définitif en bonne et
due forme soit signé par les deux parties si les pourparlers aboutissent, le
présent MOU ne constitue qu’une manifestation d’intention pour chacune des
parties.
Les stipulations du présent MOU sont néanmoins contraignantes entre les parties
dans les limites résultant expressément du MOU ». Pour davantage fixer la
nature et les limites des obligations découlant de ce MOU l’article 5 dispose :
« aucune partie ne pourra formuler des réclamations contre, ni être
responsable à l’égard de l’autre partie du fait du MOU notamment en cas de non
réalisation du projet ».
Tout est clair et limpide. Pourtant Ousmane Sonko n’en persiste pas moins dans
sa volonté de tromper l’opinion. Croit-il l’avoir mise sous hypnose ? Aussi,
refuse-t-il de considérer les dispositions de l’article 8.1 de la Convention
issue des négociations engagées entre l’Etat et la société turque à la suite de
la signature d’un MOU qui a abondamment servi Ousmane Sonko.
Comme on peut le remarquer, l’article 8.1 de la convention signée à l’issu des
négociations engagées entre l’Etat et la société turque, établit ainsi de façon
formelle, en mettant en évidence les contrevérités de Ousmane Sonko, les
obligations préalables à la construction du complexe sidérurgique : Dans les
six (6) mois à compter de la signature de la présente convention et
préalablement au démarrage des travaux de construction du complexe, le
Promoteur/développeur doit soumettre à l’Administrateur les documents suivants,
à condition que la mise à disposition du site affecté à Tosyali ne soit requise
pour les compléter :
« a) Evaluation environnementale stratégique
;
b) études d’impact environnemental et social ;
c) plan de gestion environnementale et sociale ;
d) étude de danger ;
e) études hydrogéologiques ;
f) plan de financement ;
g) business plan
On le voit donc, amalgames, confusions
volontairement entretenues et grossies à souhait, ont rythmé la conférence de
presse du député Ousmane Sonko.
La seule chose qui vaille et qui soit stable dans son discours, c’est
l’émotion, l’aversion, pour dire le moins.
On travaille ainsi en pensant naïvement pouvoir mettre tout un peuple sous
hypnose.
On veut soumettre le peuple en lui imposant un projet politique faussement
présenté sous le manteau de la transparence et de la droiture.
Que personne ne s’y trompe ! Comme toujours, « l’art de tous les chefs
populistes a consisté à concentrer l’attention des masses sur un seul « ennemi
» : Macky Sall et son régime.
Ce type de propagande peut un temps fonctionner et prendre quelques naïfs dans
son piège, mais elle n’est pas durable. Les Sénégalais doivent se montrer
cependant vigilants.
La forte démagogie qui la connote consiste à construire une nouvelle doctrine
politique sur la base de l’idée de transparence, si douteuse soit-elle, doit
être bien comprise par tous.
Les pouvoirs publics et tous ceux qui sont opposés aux idées politiques du
leader de Pasteef ne doivent nullement se contenter de dire : ce n’est qu’un
épiphénomène. Sous ce rapport, la classe dirigeante doit se montrer, face à une
telle stratégie, plus proactive et moins réactive, dans la mise en œuvre des
systèmes de communication, concernant surtout la gestion de secteurs dans
lesquels les citoyens réclament un comportement et des actes de haute
transparence.
Livrer la bonne information aux citoyens, en temps opportun et par les canaux
appropriés, c’est satisfaire leur droit inaliénable à l’information.
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