Solidarité, sobriété… À l’occasion d’une rare conférence de presse, lundi 5 septembre, Emmanuel Macron a longuement détaillé la stratégie française et européenne pour faire face à la crise de l’énergie. Il a également évoqué le délicat sujet des prix, avec un mécanisme de contribution européen pour les opérateurs énergétiques réalisant des marges importantes. Comme un air de déjà-vu. PUBLICITÉ
La France s’est dite lundi favorable à ce que l’Union européenne impose une contribution aux opérateurs énergétiques qui feraient des « bénéfices indus » avec la flambée des prix de gros de l’électricité sur le continent, rejoignant l’Allemagne qui a proposé cette approche, dimanche 4 septembre. « Nous défendons un mécanisme de contribution européenne (…) qui serait demandé donc aux opérateurs énergétiques », a déclaré le président français Emmanuel Macron, alors que la Commission européenne prépare son propre plan pour contenir la flambée des prix de l’électricité constatée cet été.
Revirement ?
Surtout ne pas dire « taxe sur les superprofits ». Mais en évoquant des bénéfices « indus », « excessifs » des géants de l’énergie, dont « les coûts de production sont largement inférieurs au prix du marché », Emmanuel Macron en a donné une parfaite définition. Le camp présidentiel n’y voit toutefois ni virage, ni concession. « Le gouvernement, le président de la République, le ministre de l’Économie ont depuis de longues semaines proposé une réforme du marché européen de l’énergie. Donc, je crois que les propos du président précisent et complètent cette approche-là », estime David Amiel, député Renaissance et co-rapporteur de la mission parlementaire sur le sujet.
Du côté de la Nupes, l’analyse est évidemment bien différente : c’est une victoire morale, souligne-t-on dans les rangs de la gauche. Mais l’on reste prudent face au mécanisme présenté par le chef de l’État. « On va attendre de voir concrètement ce que sont les propositions du président de la République, explique Benjamin Lucas, député écologiste. Ce ne serait pas la première fois qu’on aurait des annonces qui apparaissent comme étant de nature à rassurer celles et ceux qui proposent un certain nombre de mesures fiscales, et puis derrière, dans la mise en œuvre, on voit bien qu’on est toujours rattrapé par les lobbies, rattrapé par ce qui est l’identité politique de ce pouvoir particulièrement injuste et inégalitaire. »
Mécanisme non fiscal
La France soutient donc un mécanisme non fiscal, et harmonisé au niveau européen, qui permettrait de récupérer une partie des bénéfices engrangés par des producteurs d’électricité renouvelable ou nucléaire, qui produisent aujourd’hui une électricité à bas coût mais revendue à des prix records. Les prix européens de l’électricité, quel que soit son mode de production, sont en effet corrélés au prix du gaz, qui atteint depuis la guerre en Ukraine des sommets historiques. L’arrêt total du gazoduc Nord Stream, qui relie la Russie au nord de l’Allemagne, a encore fait remonter les cours lundi.
Avec cette taxe sur les superprofits qui ne dit pas son nom, Emmanuel Macron prive en tout cas ses opposants d’un cheval de bataille populaire et reprend la main sur un dossier qui divisait sa majorité et gagnait du terrain chez les voisins européens.
Les ministres de l’Énergie de l’UE se retrouveront vendredi pour discuter de la situation lors d’une réunion extraordinaire. La Commission a proposé de plafonner une partie des prix de gros de l’électricité, d’adopter des tarifs réglementés pour les plus fragiles et de renforcer les mesures incitatives pour réduire la consommation, selon un projet consulté par l’AFP.