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Laurent Gbagbo s’apprête à demander l’acquittement devant la CPI

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La Cour pénale internationale (CPI) doit ouvrir, lundi 1er octobre, des audiences clés dans l’affaire Gbagbo/Blé Goudé. Accusés de crimes contre l’humanité commis lors des violences qui avaient suivi l’élection présidentielle de 2010, l’ancien chef d’Etat et son ex-ministre demandent l’acquittement, avant même d’avoir présenté leurs témoins à décharge. Les juges devront décider, dans les prochains mois, si le procès intenté contre les deux hommes doit ou non se poursuivre.

De notre correspondante à La Haye,

Comme à chacune des grand-messes de ce procès-fleuve, les partisans de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé ont promis de venir en nombre à La Haye. Et comme si l’affaire était déjà entendue, les spéculations sur l’issue des audiences qui s’ouvrent le 1er octobre vont bon train. Après l’audition, pendant deux ans, des témoins du procureur, les avocats des deux accusés auraient dû appeler à la barre leurs témoins à décharge. Mais au printemps dernier, ils contestaient dans le détail la thèse et les preuves du procureur, et demandaient aux juges de prononcer l’acquittement.

La question posée aux trois juges pourrait se résumer ainsi : existe-t-il des preuves qui, à ce stade de l’affaire, permettraient de condamner les deux accusés ? Si tel est le cas, les avocats de l’ex-président ivoirien et de son ancien ministre devront alors appeler leurs propres témoins pour contrer les preuves de l’accusation. Si les juges devaient décider qu’aucune preuve ne permettrait de condamner, les deux hommes seraient acquittés. Au cours des six derniers mois, quelque 3 000 pages de mémoires ont été déposées par les parties. Le substitut du procureur, Eric McDonald, demande aux juges de regarder les preuves dans leur globalité, de refaire donc le puzzle des pièces qu’il a présenté au cours des deux premières années de ce procès ouvert fin janvier 2016.

Le plan du procureur

Vendredi soir, la Cour a rendu publiques 2 000 pages de mémoires de l’accusation et de la défense. Pour le procureur, Laurent Gbagbo aurait, avec son cercle proche, élaboré un plan pour conserver le pouvoir. L’ancien président aurait mis en place une politique d’Etat visant des civils ivoiriens, partisans de son concurrent à la présidentielle de 2010, Alassane Ouattara. C’est cet élément politique qui fait que les meurtres, les viols, les persécutions et les actes inhumains dont les deux hommes sont accusés peuvent être qualifiés, ou non, de crime contre l’humanité.

Mais au cours de l’audition des témoins à La Haye, le procureur a eu le plus grand mal à démontrer l’existence d’un tel plan. Dans son mémoire, il assure qu’une telle « politique ne nécessite pas d’être explicite, elle peut être déduite ». Pour l’accusation, le mode opératoire des forces de sécurité ivoiriennes, police, armée, gendarmerie, des miliciens et des jeunesses pro-Gbagbo, permettrait de déduire de l’existence d’une politique criminelle, comme la réquisition de l’armée avant le second tour de la présidentielle, l’entraînement de recrues au cours de la crise, la rhétorique des deux accusés – M. Gbagbo assurant qu’il ne quitterait pas le pouvoir – et l’absence de punition des crimes commis dans les rues d’Abidjan.

Les liens entre les deux accusés

En face, la défense assène depuis des mois qu’en mobilisant ses forces, son armée et sa police, Laurent Gbagbo n’a fait qu’accomplir ses devoirs de chef d’Etat. Maître Altit bataille aussi dans son mémoire contre les liens qu’auraient eus les deux accusés. Si un chef d’Etat peut légitimement activer ses forces armées, l’activisme des Jeunes patriotes, de mercenaires et de miliciens s’avère plus difficile à justifier. L’accusation a fait enregistrer au dossier des reçus pour des fonds provenant du cabinet de la présidence à destination de différents groupes, qui « sont indicatifs de liens entre la présidence de M. Gbagbo et la milice », notamment du Groupement patriotique pour la Paix (GPP), fort de 18 000 membres pendant la crise, selon un témoin contesté de l’accusation. Le long témoignage de Spider ou l’Araignée, de son nom de guerre, ou P435, selon le pseudonyme donné par la Cour pour sa protection, a été largement contesté par les avocats, qualifié de « voyou pratiquant le racket et l’extorsion ».

De leur côté, les avocats de Charles Blé Goudé assurent que les opérations menées par les Jeunes patriotes visaient à « protéger la population des forces rebelles ». Forces menées par Guillaume Soro, et sur lesquelles le procureur a constamment fait l’impasse au cours du procès. Mais pour l’avocat de Laurent Gbagbo, « le fait que les rebelles n’aient pas désarmé », depuis la tentative de coup d’Etat de 2002, qui avait scindé le pays en deux, « constituait une menace », expliquant les actes de l’ancien président. Maître Altit attaque aussi le rôle de la France, « maître du jeu » de l’histoire ivoirienne. Et dénonce « les silences du procureur ». Aucun témoin français, civil et militaire, n’a été appelé à la barre, reproche l’avocat parisien. « C’est un peu comme si le rôle des Etats-Unis ou de la Chine était tu au cours d’un procès sur la guerre de Corée. »

Retrait des charges pour Abobo

Dans son mémoire, le procureur signale le retrait de ses accusations contre Charles Blé Goudé pour les crimes d’Abobo, la répression, en mars 2011, d’une manifestation de femmes, et le bombardement d’un marché. Le procureur explique en outre qu’il « ne nie pas que des groupes armés d’opposition, y compris le « commando invisible » basé à Abobo, attaquaient les FDS [Forces de défense et de sécurité]. » Mais  leur présence « ne peut en aucun cas excuser ou justifier les crimes » reprochés.

Quelle sera l’issue de ces audiences ? Si les juges estiment que les preuves présentées jusqu’ici pourraient conduire à une condamnation totale ou partielle, le procès se poursuivra avec l’audition des témoins de la défense. Autrement, ils devraient acquitter les accusés et ordonner leur libération. Quelle que soit la décision à venir, qui selon une source à la Cour pourrait être rendue en décembre ou début janvier, le procureur ou la défense pourront faire appel. La conclusion définitive du procès n’est donc pas pour demain.

Mais les spéculations autour d’un acquittement proche des deux accusés ont fait réagir les avocats de l’Etat ivoirien. « Il faut à la fois se garder de réécrire l’histoire et de l’écrire à l’avance », écrivent-ils dans un communiqué. Jean-Pierre Mignard, Jean-Paul Benoit et Pierre Emmanuel Blard, dénoncent le « coup de bluff » de la défense. « Le procès qui rentre dans sa dernière phase doit se poursuivre jusqu’au bout et aucun artifice ne le fera dévier », assurent-ils.

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Invasion russe : le chef de la diplomatie ukrainienne à Dakar en octobre

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Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, est attendu à Dakar les 3 et 4 octobre prochain. D’après Le Quotidien, qui donne l’information, il sera reçu par son homologue sénégalaise, Aïssata Tall Sall, et le Président Macky Sall.

Le journal souligne qu’à travers ce déplacement au Sénégal, qui assure la présidence de l’Union africaine, Kiev cherche à élargir son cercle d’amis dans ce contexte d’invasion russe et, surtout, à établir des rapports solides avec les pays du continent.

«Je suis convaincu que le Président Macky Sall peut jouer un rôle important en tant que président en exercice de l’Union africaine», avait déclaré Dmytro Kuleba, en juin dernier, dans un entretien avec le journal Le Quotidien.

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Iran: au moins 76 personnes tuées dans la répression des manifestations selon une ONG

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Au moins 76 personnes ont été tuées en Iran dans la répression des manifestations déclenchées il y a dix jours par la mort d’une jeune femme détenue par la police des mœurs, a indiqué lundi une ONG. 

Selon l’ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, « au moins 76 personnes ont été tuées dans les manifestations » dont « six femmes et quatre enfants », dans 14 provinces du pays. L’IHR a affirmé avoir obtenu des « vidéos et des certificats de décès confirmant des tirs à balles réelles sur des manifestants ».

Les protestations ont éclaté le 16 septembre après le décès à l’hôpital de Mahsa Amini, une jeune Iranienne de 22 ans, arrêtée trois jours auparavant à Téhéran pour non-respect du code vestimentaire strict pour les femmes en République islamique d’Iran. Depuis, les Iraniens descendent chaque soir dans la rue à Téhéran et ailleurs dans le pays. Les autorités iraniennes ont elles jusque-là donné un bilan de 41 morts incluant manifestants et forces de l’ordre. Elles ont aussi annoncé l’arrestation de plus de 1 200 manifestants. 

Tirs à balles réelles

Ce lundi soir, les protestations ont repris avec les mêmes slogans de « Mort au dictateur » dans la capitale et dans d’autres villes, selon des témoins. À Tabriz dans le nord-ouest, une vidéo diffusée par l’IHR a montré des policiers tirant du gaz lacrymogène contre les manifestants. Le bruit des tirs de balles y est en outre entendu.

Selon de récentes vidéos publiées par l’AFP, la police anti-émeute a, lors des protestations, frappé des manifestants à coups de matraque et des étudiants ont déchiré de grandes photos du guide suprême Ali Khamenei et de son prédécesseur, l’imam Khomeiny. Et d’après des groupes de défense des droits humains, elle a aussi tiré des plombs et à balles réelles sur les protestataires qui ont lancé des pierres, incendié des voitures de police et mis le feu à des bâtiments publics. D’autres images ont montré des femmes enlevant et incendiant leurs voiles ou se coupant symboliquement les cheveux, encouragées par la foule, dans plusieurs villes.

Outre les plus de 1 200 arrestations par les autorités, le Comité pour la protection des journalistes a fait état lundi de l’arrestation de 20 journalistes iraniens depuis le 16 septembre.

L’UE dénonce l’usage « généralisé et disproportionné de la force »

Face à la répression, l’Union européenne a dénoncé l’usage « généralisé et disproportionné de la force ». Condamnant la « répression brutale » de la contestation par Téhéran, la France a indiqué lundi soir qu’elle examinait avec ses partenaires européens « les options disponibles en réaction à ces nouvelles atteintes massives aux droits des femmes et aux droits de l’homme en Iran ».

Le président américain Joe Biden a, lui aussi, dénoncé la répression des manifestations, se disant solidaire des « femmes courageuses d’Iran ». Le Canada a décidé d’imposer des sanctions contre une dizaine de responsables iraniens et d’entités dont la police des mœurs. Et Berlin a appelé l’Iran à « ne pas recourir à la violence » contre les manifestants.

Mais les autorités iraniennes restent fermes. Samedi, le président conservateur Ebrahim Raïssi a appelé les forces de l’ordre à agir contre les manifestants, qualifiés « d’émeutiers ». Après lui, le chef du pouvoir judiciaire, Gholamhossein Mohseni Ejei, a exclu toute « indulgence » envers les instigateurs des « émeutes ».

RFI

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RDC: Kinshasa confrontée à la résurgence d’attaques des «kulunas»

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La terreur règne dans plusieurs communes de Kinshasa à la suite de la résurgence des attaques des « kulunas », criminels qui amputent des membres, tuent, rackettent et volent des biens, le jour comme la nuit. Les autorités assurent que la situation est sous contrôle, mais la flambée des cas inquiète la société civile. Les députés dénoncent un vide sécuritaire dans la capitale.

Le cas le plus récent des attaques des « kulunas » est celui d’un policier tué durant le week-end du 24-25 septembre à coups de machettes dans la commune de Kimbanseke, la plus peuplée des 24 communes de la capitale Kinshasa. Le député provincial Erick Bukula est excédé :

« La police n’arrive plus à contenir le phénomène. Il y a des  » kulunas  » qui abattent, tranchent la main ou la tête de telle ou telle personne, qui blessent même des policiers. Ils sont devenus comme des milices pour des règlements des comptes. »

La police fait, selon lui, face à plusieurs problèmes, dont des effectifs réduits, mais pas seulement : « Dans plusieurs communes, comme dans la commune de Limete par exemple, avec 14 quartiers, vous serez étonnés de savoir qu’il y a moins de quatre sous-commissariats. Dans ces commissariats, vous ne trouverez que trois ou quatre policiers, soit un seul qui a une arme à feu. Donc, il y a un problème d’effectifs, d’équipements et de recrutement des policiers. Le gouvernement national devrait financer la police de Kinshasa en ce qui concerne la sécurité. »

Le chef de la police de Kinshasa, Sylvano Kasongo, assure que la situation est sous contrôle grâce aux opérations de bouclage et des patrouilles de routine. Mais il attend une plus grande collaboration :

« Nous ne sommes pas débordés ni dépassés. Il y a des mesures que nous allons prendre pour endiguer le phénomène. La difficulté, c’est la collaboration de la population, parce que ces  » kulunas  » ne sont pas des extra-terrestres. Ils habitent dans des maisons, des parcelles, ils ont des parents et tout ça. J’appelle la population à collaborer toujours, pour charger les  » kulunas  » pour que ces gens puissent être condamnés par la justice. Nous avons installés des boîtes aux lettres anonymes dans chaque commune pour que les populations se sentent à l’aise de venir dénoncer. »

Des milliers de « kulunas » ont été mis aux arrêts depuis le début de l’année par la police. Certains ont été envoyés au service national pour leur rééducation, tandis que d’autres ont été déférés devant la justice.

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