Son embarcation dénommée «Maïmouna Guèye» a chaviré en haute mer lundi 07 mai dernier. Iba Fall, originaire de Guet-Ndar, capitaine de la pirogue et son jeune collègue, Aladji Sow, ont été retrouvés fortuitement par une embarcation qui menait une partie de pêche. Deux jours passés dans les eaux ! Iba Fall, qui avait perdu tout espoir de rester en vie, relate sa mésaventure.
«Maïmouna Guèye» a sombré. Unique patrimoine, seule source de revenus de la famille, cette embarcation est partie sans prévenir. Et pourtant c’est d’elle que dépendaient entièrement, directement et indirectement Iba Fall, sa progéniture et ses proches, établis dans le populeux quartier des pêcheurs de Guet-Ndar à Saint-Louis. Et lorsqu’il repense à la genèse de cette embarcation, il a quasiment les yeux larmoyants. Mais il refuse de perdre confiance. Il garde sa foi en Dieu. Ce Tout Puissant à qui il s’était entièrement abandonné lorsque l’incertitude avait envahi sa vie. Ce père de famille avait perdu tout espoir de revoir ses petits. Il n’espérait plus qu’une main allait se balader là où il était pour l’extirper de cette pénible situation. Iba semble être encore sous le choc. Des accidents en mer, il en connait. Celui-ci a été tout à fait particulier, d’après lui. Ce père de famille de 27 ans est resté deux jours dans la mer sans nourriture.
«Le lundi, nous avons décidé d’aller en haute mer pour aller pêcher car le produit s’était fait rare près de la côte de Kayar où nous étions basés. Avec mes deux collègues, je me suis rendu à 50 km au large. Après une journée de pêche, nous avons emballé notre matériel pour retourner. C’est sur le chemin du retour que le moteur de la pirogue a été pris dans un filet. C’est quand je m’affairais à couper le filet que la pirogue s’est renversée», a-t-il expliqué. Avec la pénombre, le capitaine Iba Fall perd de vue le plus jeune membre de l’embarcation, Moussa Sow. «Quand la pirogue s’est renversée, j’ai retenu solidement Aladji Sow pour qu’il ne se perde pas, puisqu’il faisait noir, il aurait été très facile de se disperser». Ces pêcheurs ont pu se maintenir deux jours à la surface de l’eau grâce à leurs gilets de sauvetage. «Si nous n’avions pas nos gilets de sauvetage, nous serions morts depuis bien longtemps car là où nous étions, c’est tellement loin que personne ne pouvait réussir à nager jusqu’à la côte. Nous avions commencé à nous déplacer dans le but de regagner la côte, mais quand j’ai analysé la situation, j’ai proposé à mon collègue que nous restions sur place pour ne pas perdre davantage de forces», a-t-il ajouté.
«Pendant tout le temps qu’on était dans l’eau, on entendait le bruit de moteur de pirogues qui passaient dans les environs et on criait de toutes nos forces, sans succès. On buvait l’eau de la mer, au final, je n’avais plus espoir de revenir auprès de mes proches», souligne le capitaine de la pirogue. Iba Fall et Aladji Sow sont restés deux jours en haute mer avant d’être repêchés par une embarcation qui revenait d’une expédition, à 18 heures. «Il ne faisait pas encore sombre, c’est pourquoi nous avons eu la chance d’être aperçus par le piroguier. Après nous avoir repêchés, il a fait un tour pour rechercher Moussa Sow, que j’avais perdu de vue depuis le jour de l’accident. Puisqu’il commençait à faire nuit, il a décidé de poursuive son chemin. C’est quand je suis revenu à Saint-Louis qu’on m’a informé que Moussa Sow s’en est sorti sain et sauf, puisqu’il a été retrouvé par une embarcation le lendemain des faits», a souligné Fall. Ce capitaine a vanté les mérites du port de gilet de sauvetage, qui à plusieurs reprises, lui a permis de garder la vie sauve en mer. «Il m’arrivait de tomber en mer, mais je m’en suis toujours sorti parce que je porte tout le temps mon gilet de sauvetage. C’est une occasion de lancer un appel à tous les pêcheurs à privilégier le port du gilet de sauvetage pour limiter les pertes en vies humaines en cas d’accident», a-t-il conseillé.
Ibrahima Fall, qui s’active dans la pêche à la ligne, a commencé à explorer les eaux de Kayar lorsque la Mauritanie a mis en œuvre la mesure d’interdiction de la pratique de la pêche aux étrangers. Ce qui avait envoyé au chômage nombre de pêcheurs de la Langue de Barbarie. «Je suis rentré de la Mauritanie sans mon matériel de pêche. Je n’ai pas eu le temps de le récupérer». Iba Fall, refusant de s’installer dans l’oisiveté avait, après plusieurs mois de chômage forcé, réussi à acquérir un matériel avec le soutien de ses proches. «Il a fallu tout reprendre quand je suis rentré de la Mauritanie. Je ne pouvais pas rester sans travailler, puisque je suis soutien de famille. Une de mes connaissances à Kayar m’a construit récemment une pirogue que je devais payer par tranches. En plus, j’avais fait un prêt pour acheter un moteur. C’est ainsi que j’ai bâti mon embarcation dénommée «Maïmouna Guèye». Je n’ai même pas eu le temps de rembourser le prix du matériel à mes créanciers. Voilà que je viens de perdre ma seule source de revenus», a-t-il indiqué. Venu à son assistance après son retour à Saint-Louis, le coordonnateur régional du Conseil national interprofessionnel des pêches du Sénégal, Cheikh Sidati Fall, a plaidé en sa faveur afin de disposer de nouveaux matériels de pêche pour relancer ses activités.
Auteur : L’Observateur
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