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Horticulture à Diourbel : Kammbi Suuf, le paradis des maraîchers.

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Diourbel a connu ses lettres de noblesse avec le maraîchage. Le marché Ndiarème de Dakar tire son nom du stockage et de la vente des légumes en provenance de Diourbel.

Pourvoyeuse de légumes , Diourbel est obligée maintenant d’aller en  chercher au marché.  Faute d’appui de l’État, la sécheresse aidant et l’action de l’homme sur la nature ont beaucoup contribué à la belle mort du secteur qui tente  de résister tant bien que mal à cette mort programmée. Le secteur périclite, agonise et se dirige vers une disparition quasi-certaine. Grandeur et décadence d’un secteur qui faisait jadis la fierté d’une localité.

Le nom Kammbi Suuf renvoie à des dunes qui entretiennent des centaines de ménages, situés dans la partie Sud- Ouest de la commune de Diourbel, Kammbi Suuf est le nouvel exil des maraîchers.

Sur le plan hydrogéologique, la zone appartient à l’ancien lit de la vallée morte du Sine. Au début des années 80, la nature géologique de la zone, constituée de terrains sédimentaires, a été  à l’origine de sa transformation en carrière d’extraction de sable destiné à la construction. Son sable fin malaxé avec le ciment est très prisé dans la construction. Kammbi Suuf a connu un regain d’intérêt au début des années 80 .

En effet, de nombreux maraîchers de la commune de Diourbel, confrontés à une sécheresse qui a asséché les bassins d’eau se sont redéployés dans la zone. Les dépressions de la carrière abandonnée ont été  morcelées   en parcelles destinées au maraîchage qui est resté longtemps florissant.

Cependant, l’installation de l’usine de la Sonacos, actuel Suneor à côté du site, a contribué à la dégradation de l’environnement. En effet, les rejets industriels de l’usine constituée entre autres d’eau usée sont comme une source de pollution de l’environnement, donc une menace pour les activités de maraichage et même pour la faune. Les activités de maraîchage sont aujourd’hui en sursis, regrette-t-on.

ZONE EN PÉRIL, MARAÎCHAGE EN SURSIS.

La dégradation de l’environnement à Kammbi Suuf est consécutive à la sécheresse des années 70 . Il y a aussi la salinité  des terres que les maraîchers tentent de stopper en ayant recours à des méthodes archaïques . El Hadji Tacko Ndiaye : « nous utilisons de la coque d’arachide dans ce cas ».

L’installation de l’usine de la Suneor n’a pas facilité les choses. C’est en 1980 que l’ex-Société des Établissements Industriels du Baol ( SEIB), aujourd’hui est devenue la  Suneor a été transférée sur son actuel site à proximité de la zone de  Kammbi Suuf.

Déjà, lorsqu’elle était située au centre la commune de Diourbel, le rejet usées a créé un lac artificiel fortement pollué. Du reste, les activités de maraîchage qui se pratiquaient dans la vallée du Sine ont été fortement affectées. Elles ont fini par disparaître complètement.Ainsi, c’est le même schéma de pollution que l’usine est entrain de reproduire dans la zone de Kammbi Suuf. La source de pollution se trouve dans les rejets industriels contenus dans les eaux que l’usine rejette régulièrement. Parmi ces produits rejetés, l’acide caustique est particulièrement nuisible pour les plantes.

Pourtant, pour contenir les eaux usées, l’usine de la Sunéor a créé une digue aux abords de l’usine. Mais les fortes précipitations augmentent régulièrement le niveau des eaux « stockées » que la digue ne peut plus contenir. 

Ainsi, les responsables de la société , afin d’éviter l’envahissement de l’usine ouvrent des brèches sur la digue, les eaux polluées ainsi libérées se déversent dans les parcelles de maraîchage; C’est en 1983, soit trois ans après le transfert de l’usine que l’on a noté le premier envahissement des eaux polluées de l’usine au niveau de Kammbi Suuf..Depuis lors, la zone est régulièrement envahie par les eaux polluées de la Sonacos. Les dégâts causés par les eaux polluées sont visibles sur le terrain. Des parcelles sont complètement ensevelies. Des puits ont été détruits de même que de nombreux arbres fruitiers comme les papayers entre autres. Très stoïques, les maraîchers attendent que les eaux polluées se retirent pour déblayer les parcelles et continuer ainsi leurs activités.

Beaucoup d’abandons ont été notés chez les maraîchers.  La production et les rendements ont fortement chuté. Au mois de mai, la forte chaleur et l’évaporation font remonter l’acide caustique à la surface détruisant ainsi les plantes. Pratiquement pendant les mois qui correspondent à la forte canicule les activités de maraîchage tournent au ralenti. 

Au-delà du maraîchage, le péril écologique causé par les eaux usées de la Sonacos menace également la faune, particulièrement  les oiseux migrateurs. Certains d’entre eux, surtout les hérons, meurent aprés avoir absorbé cette eau polluée qui contient entre autres de l’acide caustique;

RÉHABILITATION ET SAUVEGARDE DE KAMMBI SUUF.

Ainsi,il apparaît plus qu’urgent de réhabiliter le site de Kammbi Suuf. Les menaces écologiques sont réelles et imposent des solutions durables. Il est indéniable que les eaux polluées, particulièrement l’acide caustique de la Sunéor a causé de graves dommages à l’écosystème. Si on n’y prend garde, ce sont les activités maraîchères qui risquent de disparaître définitivement de la zone de Kammbi Suuf. La disparition de ces activités maraîchères risque de mettre au chômage une centaine d’exploitants qui n’assurent leur survie que grâce à l’exploitation maraîchère. Réhabiliter Kammbi Suuf, c’est également promouvoir une forme de développement durable, car la zone a assuré pendant des années l’approvisionnement de Diourbel en fruits et légumes.  Cette réhabilitation permet également de sauver des oiseaux migrateurs qui meurent dans l’indifférence totale en absorbant cette eau polluée.D’anciens responsables de l’usine de la Sunéor interpellés avaient promis de réagir en vain. En effet avec la Division Régionale de l’Environnement, ils avaient effectué plusieurs missions sur le terrains.

À ce niveau des maraîchers comme Bassirou Sall avaient  « déploré le fait que les multiples missions sur le terrain ne soient pas encore traduites par des actions concrètes de réhabilitation du site. Du reste, même les conclusions de ces rapports ne sont pas portées à la connaissance des maraîchers.  La station d’épuration de l’usine ne fonctionne pas. Dans le cadre de la mise en oeuvre du projet Veille et Alertes Environnementales, le consortium « Agir Maintenant »  composé de la Raddho et de Baol Environnement comptent  poursuivre le travail de sensibilisation auprès des responsables de l’usine et au niveau des maraîchers pour des solutions concertées au problème de pollution  de cette zone.

«Les responsables de l’usine doivent être contraints à respecter les normes de rejets industriels, une des dispositions du code de l’environnement, à défaut de ne plus rejeter de déchets industriels dans la nature ». Pour ce faire, la station d’épuration doit être fonctionnelle.

En effet, réhabiliter Kammbi Suuf, permettra de relancer les activités de maraîchage à Diourbel, localité qui s’était illustrée comme un des fleurons  du maraîchage dans la zone du bassin arachidier . En  définitive, si la source de pollution n’est pas maîtrisée ou éradiquée en amont, c’est-à-dire au niveau de l’usine , « tous les programmes de réhabilitation des sols de Kammbi Suuf risquent d’être voués à l’échec », regrette Mamadou Khouma chargé de la formation du Consortium « Agir Maintenant » ;

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