Une « campagne de nettoyage ethnique » dans le Tigré occidental en Ethiopie, c’est ce qu’Amnesty International et Human Rights Watch dénoncent dans un rapport conjoint rendu public ce mercredi. Zone administrative contestée, sous autorité tigréenne depuis les années 90, le Tigré occidental est passée sous le contrôle des forces de défense nationale éthiopiennes (ENDF) et des forces et milices alliées de la région d’Amhara dans les deux semaines qui ont suivi le déclenchement du conflit au Tigré en novembre 2020.
« Ils n’arrêtaient pas de dire : « Nous allons vous tuer. Partez de la région » », raconte une Tigréenne. Ce témoignage fait partie des centaines recueillis par les enquêteurs d’Amnesty International et Human Rights Watch. Au total, 400 récits ont été récoltés par les ONG. Dont celui d’un Tigréen de 70 ans, arrêté à Humera l’an dernier, raconte Laetitia Bader, la directrice pour la Corne de l’Afrique à Human Rights Watch.
Il a été détenu pendant 2 semaines à Bet Hintset, l’un des centres de détention informels où nous avons documenté les pires abus à Humera, avec ce qu’il pense être des milliers d’autres prisonniers. Il a été battu – un homme de 70 ans – à plusieurs reprises. Pendant sa détention, deux hommes plus âgés qu’il connaissait ont eux été battus à mort. Au bout de deux semaines, et alors qu’il était déjà dans un état terrible, il a été embarqué dans un camion et transporté vers la rivière Tekeze. Plus tard, dans une autre partie du Tigré, cet homme va survivre à une attaque de drones. Ces crimes incroyablement graves devraient susciter un tollé et une réaction au niveau mondial. Mais cette campagne contre les Tigréens a été cachée au monde entier à cause non seulement de la volonté des autorités fédérales et régionales de bloquer l’accès aux défenseurs des droits de l’homme et aux médias indépendants, mais aussi en raison des restrictions imposées aux communautés qui les empêchent de fuir.