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Abdoulaye Diaw, Virtuose de la guitare, chanteur et plasticien: « Le fleuve et la mer constituent ma source d’inspiration »
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5 ans ..Date :
On l’appelle affectueusement « le poète du fleuve », car, depuis 25 ans, il chante la vie, les rapports entre les hommes, « le fleuve, c’est l’âme de Saint-Louis, c’est mon inspiration et il est féminin car, toutes les déesses du fleuve, de l’eau, sont des femmes, c’est cette mouvance qui me donne des mélodies, comme si j’étais dans l’eau, sous l’eau, je suis bercé avec les vagues, par notre déesse ».
Il passe le plus clair de son temps à chanter, à faire vibrer sa guitare sèche, à réaliser des chefs d’œuvres d’art plastique, de Patchwork, etc. C’est un guitariste, chanteur, peintre, décorateur, qui a commencé à exprimer son talent dès sa tendre enfance.
Ce qui me révolte, nous confie Layranks, car, c’est de lui qu’il s’agit, « ce sont les mauvais comportements, c’est le manque de respect, ce sont les inégalités sociales et les discriminations ».
C’est un artiste multi facettes, qui s’est inspiré du terme scientifique « larynx », qui appartient au système respiratoire, pour se surnommer Layranks.
Il convient de rappeler que le larynx est un organe situé dans la gorge, intermédiaire entre le pharynx et la trachée. Son rôle prioritaire est d’assurer le passage de l’air vers les poumons lors de l’inspiration, ou vers l’extérieur lors de l’expiration. Il contient aussi une membrane qui se ferme automatiquement lors du passage de la nourriture du pharynx versl’œsophage au cours de la déglutition, évitant ainsi l’arrivée d’aliments dans les voies aériennes (la trachée par exemple).
Le larynx a aussi un rôle important dans la phonation. Il contient les cordes vocales et des muscles modifient l’ouverture de la lumière du larynx pour moduler les sons produits.
Ma chanson préférée est le River Song, « en fait, le fleuve et la mer m’ont inspiré presque tous mes morceaux, dans cette chanson, je célèbre le fleuve, je suis né dans l’île de Saint-Louis, on m’a baigné dans le fleuve et ensuite dans la mer, c’est une vieille tradition de Domou-Ndar, certains n’ont pas eu cette chance car, parfois, nous oublions notre culture, une valeur que nous conservons après avoir tout perdu, moi, je n’ai pas perdu cette culture, j’en suis fier et je m’évertue à la perpétuer, les mélodies que vous entendez, ce sont les sons du fleuve et je les chante à la déesse Mame Coumba Bang, Génie tutélaire des eaux, une sirène à la beauté incommensurable, incomparable et inégalable, ce que vous entendez, je l’ai cueilli, je l’ai ramassé dans l’eau, dans les jeux que font les vagues ».
J’ai choisi comme nom de scène Layranks, « mais mon vrai nom est Abdoulaye Diaw, quand j’ai commencé à faire du reggae, comme la voix part du larynx, des cordes vocales, je me suis dit, allons pour Layranks ».
Je suis né dans le sud de l’île, la montée et l’avancée de la mer me font peur, « avant, sur la langue de Barbarie, il fallait marcher longtemps pour trouver la mer, maintenant, elle est là ».
On a trouvé du pétrole et du gaz au large de Saint-Louis, « mais est-ce qu’on en profitera ? On continuera à subir les conséquences désastreuses de l’avancée de la mer, on est en mode détresse et cela me fait vraiment peur, est-ce qu’on aura toujours Saint-Louis avec nous dans l’avenir, avec tout ce qu’elle représente à travers son fleuve, son inspiration et ses mélodies, on a trouvé Saint-Louis et le fleuve et on a grandi avec, on ne veut pas perdre tout cela ».
A travers ses différentes prestations, Layranks, pionnier du mouvement hip-hop de Saint-Louis dans les années 1990 (au sein du groupe Black Muslims), prouve toujours qu’il est l’un des piliers de la musique Made in Saint-Louis. Passant avec aisance de l’acoustique au raggamufin, il se produit dans les cabarets de la capitale du Nord et inspire toujours le respect et l’admiration des nouvelles générations. Sur scène, il se comporte comme les grands musiciens de Reggae jamaïcains.
Agé de 47 ans, il a fait ses études primaires à l’école Ndaté Yalla du sud de l’île, ses études secondaires hors de la ville tricentenaire. C’est vers 1993 que son destin l’a plongé subrepticement dans l’univers de l’art. La musique, l’art plastique, la décoration, etc, deviennent ainsi son domaine de prédilection, son espace d’expression et de dialogue avec les autres. Il se retrouve dans ce pan important du monde culturel, où il finit par exceller. Son art lui a permis, au fil du temps, de sortir de sa coquille, de s’extérioriser. C’est une manière de dire que Layranks s’est finalement retrouvé dans son élément, dans son milieu naturel.
Au centre culturel français de Saint-Louis, lors du dernier concert du Festival « Métissons »,initié depuis dix ans par Jean Michel Smitch, qui en est l’organisateur principal, Layranks ou Abdoulaye Diaw, célèbre guitariste et chanteur sénégalais, domicilié à Sindoné (sud de l’île de Ndar), a partagé, dans un bel élan de solidarité et de mobilisation, la scène avec des musiciens espagnols qui jouaient du Flamenco et Cheikh Ndigeul Lô.
Ce fut une belle soirée électrique, au cours de laquelle, le public a été également séduit par la prestation de Yinka Esi Graves, une grande danseuse de Flamenco, restée profondément marquée par l’introduction fracassante et tonitruante de Layranks.
Avec ses dreadlocks, son trousseau vestimentaire atypique, Layranks est impressionnant sur scène. Il a le secret et le don de crucifier les festivaliers, obligés très souvent de se concentrer pour admirer ses gestes emphatiques, ses déplacements qui s’enchaînent et se déroulent avec une rapidité déconcertante, sa chorégraphie majestueuse.
D’une énergie débordante, il mesure ses pas, arrache le micro, qu’il manipule avec une dextérité remarquable, se contorsionne, à la manière de Bob Marley, fait parler et bouger son corps, bien moulé dans des costumes multicolores et attrayants.
C’est un grand plaisir de le voir galvaniser sur scène un public très nombreux, massé aux alentours de ses lieux de concert. Auteur, compositeur et interprète, ce guitariste et chanteur, amateur de reggae et autres genres musicaux, Layranks a l’habitude de présenter à ses fans et autres festivaliers qui le suivent d’une ville à une autre, d’un pays à un autre, pour assister à ses prestations de haute facture, un répertoire musical puisé dans toute la richesse du patrimoine sénégalais, pour créer un style musical propre et porté par sa voix suave, qu’il module de temps à autre, en grave, aiguë, en bémol ou Diez, en majeur ou en mineur 7ème, 5ème ou 13ème, etc.
Pour connaître cet artiste, il est absolument nécessaire de le voir dialoguer avec le public. Ce guitariste et chanteur de Sindoné (il habite à quelques encablures du lycée des jeunes filles Ahmeth Fall) donne réellement envie d’esquisser des pas de danse, savamment accompagnés de rythmes qui s’enchevêtrent (la polyrythmie), qui se recoupent, qui se complètent et qui ont beaucoup plus de ressemblances que de différences.
D’ailleurs, c’est ce qui facilite souvent son entente, sa complicité avec d’autres artistes sur scène.
C’est un artiste comblé et accompli, qui est au summum de son art et qui est souvent très excité et inspiré lorsqu’il est programmé dans des festivals organisés pour favoriser le brassage culturel, le retour aux sources, le choc des cultures, les échanges culturels, la découverte de nouveaux genres musicaux, etc. Nul ne peut résister à la mélodie de cet éminent artiste multi facettes, à la voix d’or.
C’est un artiste très célèbre, qui ne passe pas inaperçu dans la capitale du Nord, dans les rues, ruelles et artères de l’hydrobase, etc. Il développe avec brio un genre musical nouveau, atypique et enrichissant. D’autant plus qu’en écoutant de plus en plus cette virtuose de la guitare, on s’ouvre au modernisme en s’enracinant dans nos traditions, nos valeurs culturelles, us et coutumes africaines.
Ce qui est impressionnant, captivant, délirant, chez ce musicien de gros calibre, c’est qu’à chaque fois qu’il joue un nouveau morceau, on a l’impression qu’il est meilleur que le précédent. Et du fait de ce changement agréable de rythme, il tient en haleine des foules en liesse, hystériques, des festivaliers venus de loin pour décompresser, s’épanouir et communier dans la joie et l’allégresse.Avec Layranks, on arrive difficilement à se faire violence pour se maîtriser. Certains mélomanes remuent la tête et les épaules, tandis que d’autres, ne pouvant pas se retenir, accompagnent la musique endiablée de ce chanteur, en esquissant des pas de danse, en se contorsionnant pour marquer les refrains. Des déhanchements qui donnent toujours une idée de l’engouement populaire suscité par ses belles prestations. Awa Diagne Sall Kharachi