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Entretien avec le Professeur Cheikh Tidiane NDIAYE: il se prononce sur la réforme du franc CFA à l’ECO.

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La Direction de la Communication et du Marketing de l’UGB est allée à la rencontre du Professeur Cheikh Tidiane NDIAYE, enseignant-chercheur à l’UFR De Sciences Économiques et De Gestion (UFR SEG) de l’Université Gaston Berger. Ce dernier se prononce sur la réforme du franc CFA à l’ECO.

DCM : Veuillez-vous présenter

Je m’appelle Cheikh Tidiane NDIAYE, je suis enseignant-chercheur à l’UFR de Sciences Economiques et de Gestion et coordonnateur du Master Développement Rural et Coopération. Mes travaux de recherche se rapportent à la politique économique (monétaire et budgétaire) et à l’évaluation de son effet quantitatif sur les fluctuations économiques aux niveaux théorique et empirique.

DCM : Quels enseignements tirez-vous de cette réforme du FCFA annoncée par le Président Ouattara le 21 décembre 2019 ?

En tant que citoyen sénégalais, j’ai été surpris de constater comme tout le monde que les réformes apportées n’ont pas été à la hauteur des attentes. Les réformes ont porté principalement sur trois points : le changement du nom avec le passage du franc CFA à l’ECO, la fin de la centralisation de 50% des réserves de change auprès du Trésor français accompagnée de la fermeture des comptes d’opération, le retrait des représentants de la France de tous les organes de décision et de gestion.

Le premier enseignement qu’il faut tirer de cette réforme est que les Présidents Ouattara et Macron se sont usurpés de la dénomination de la monnaie unique « ECO » du projet de la CEDEAO sans prendre en compte les principales recommandations de la réunion du comité ministériel de la CEDEAO à Abidjan les 17-18 juin 2019. L’une des premières recommandations était la mise en place d’un régime de change flexible assorti de ciblage d’inflation comme cadre de politique monétaire. Les conséquences d’une telle réforme se feront ressentir sur l’unité des pays membres de la CEDEAO puisque les pays non membres de la zone franc n’accepteront nullement d’être sous la tutelle directe ou indirecte de la France. Cette réforme ne permettra pas à nos pays d’avoir une politique monétaire tournée vers les objectifs économiques internes (objectifs d’activité).

La politique monétaire actuellement en vigueur dans nos pays est orientée uniquement vers la stabilité des prix qui ne crée pas le meilleur environnement pour le développement de l’activité sur le court et moyen terme. De même, cette réforme ne nous permettra pas de nous débarrasser, d’une part, de la baisse récurrente des recettes d’exportations des produits primaires et des contraintes externes du coût de la dette, et d’autre part, de la servitude volontaire des chefs d’Etats des pays de l’UEMOA. L’impact positif ne se fera pas ressentir sur le développement économique des pays de la zone du fait de l’insuffisance des réserves de change (position extérieure faible). Il faut rappeler que l’accumulation des réserves n’est possible qu’avec une bonne dynamique d’exportation. Il est possible de concilier un régime de change fixe avec les objectifs économiques internes à condition que les réserves de change soient suffisantes (position extérieure forte). En outre, les taux d’intérêts élevés permettant l’entrée des capitaux étrangers ne favorisent pas l’émergence des économies de la zone. Les pays de l’UEMOA ont des politiques budgétaires nationales avec des marges de manœuvre très limitées qui ne leur permettent pas de faire face aux problèmes relatifs au manque de capital et d’investissement. Seule une politique monétaire tournée vers des objectifs économiques intérieurs pourrait leur permettre de régler les problèmes de développement économique auxquels ils sont confrontés.   

Le second enseignement qu’il faut tirer de cette réforme est que les chefs d’Etat des pays de l’UEMOA ne cessent de prendre des décisions qui engagent l’intérêt de toute la zone au grand mépris de leur peuple. Cette réforme devrait être soumise au peuple avant d’être entérinée. Le dernier mot doit toujours revenir au peuple pour une question aussi importante que la monnaie. Celle-ci est une expression de la souveraineté. Son acceptation repose sur des croyances, des pratiques et des attentes qui dépassent la seule sphère économique. Elle a pour fondement une communauté de destin, c’est pourquoi il n’est de pouvoir monétaire viable que s’il est adossé à une souveraineté.

DCM : Avons-nous besoin d’un garant pour la monnaie de la zone UEMOA. Si oui, la France est-elle un bon garant ?

Oui, notre régime de change fixe fait partie de la famille (currency board, dollarisation, Union monétaire) des « ancrage durs » soutenue par un schéma institutionnel très strict pour garantir la parité. Le régime de change fixe peut être rendu plus souple par des marges de fluctuations confortables et/ou par un calendrier de dévaluation (ancrage glissant) permettant d’adapter le rythme de dévaluation d’une monnaie au processus de désinflation.

D’autres régimes de change (régime intermédiaire) impliquant un objectif explicite de taux de change n’ont pas besoin de dispositif institutionnel pour garantir la parité fixe.

Les pays de l’UEMOA ne disposent pas d’une position extérieure forte auraient pu choisir un régime intermédiaire ou un régime de change flexible comme le suggère le projet de création de la monnaie commune à l’échelle de la CEDEAO. Ils ont accepté une pratique monétaire proposée par la France qui ne rime pas avec leur contexte économique. Les pays de l’UEMOA ont plus besoin d’une politique monétaire orientée vers la croissance et l’emploi (objectifs d’activité) plutôt qu’un objectif de stabilité des prix (objectifs de stabilité). Les objectifs d’activité constituent les véritables objectifs finaux des politiques économiques qui doivent être recherchés en priorité dans le contexte actuel de nos pays. Il faut que nos gouvernants comprennent qu’on se moquerait de vivre avec un taux d’inflation de 8 ou 12% par an si l’activité était dynamique et le taux de chômage très faible.

La France n’est pas un bon garant car cette coopération monétaire lui a toujours permis de bénéficier des opportunités d’investissement et de commerce dans les pays de l’UEMOA et de réduire son risque de change. Or, ce système de coopération ne profite en rien les pays de l’UEMOA en quête d’un développement économique harmonieux.

DCM :  Quels sont les avantages et inconvénients d’un régime de change fixe pour les économies de l’UEMOA?

Le régime de change fixe a deux principales vertus : la discipline monétaire et la capacité à promouvoir le commerce et l’industrie. L’incitation à la discipline monétaire reflète une aversion pour l’inflation et une préférence plus forte pour stabiliser les prix. La capacité à promouvoir le commerce et l’industrie signifie qu’il y aura une intensification des échanges grâce à l’élimination des coûts de transaction, à la baisse de l’incertitude liée aux fluctuations des taux de change et à l’amplification des effets externes positifs.

Les inconvénients du régime de change fixe dans le contexte des pays de l’UEMOA sont, entre autres :

–          le régime de change fixe n’offre pas des capacités d’ajustement aux chocs externes qui sont très récurrents dans les pays de l’UEMOA ;

–          le régime de change fixe conduit très souvent un ajustement en termes réels qui se reflète par des taux d’intérêts très élevés susceptibles d’inhiber l’émergence des pays ;

–          le régime de change fixe retarde de façon considérable les investissements nécessaires susceptibles de faciliter la spécialisation internationale et le développement du tissu industriel ;

–          le régime de change fixe ne peut être utilisé comme un instrument d’ajustement en cas de détérioration récurrente des termes de l’échange ;

–          le régime de change fixe pénalise les pays de l’UEMOA qui se sont spécialisés dans l’exportation de produits primaires, etc.

DCM : Quelle est la monnaie la plus adaptée à notre situation économique actuelle et surtout à nos objectifs de développement (nous faut-il une monnaie unique avec les pays de l’UEMOA ou avec ceux de la CEDEAO ou une monnaie nationale) ?

Deuxièmement quel est le régime le plus adapté (un régime de change fixe , un régime de change fixe mais ajustable , un régime de change flexible ou une monnaie arrimée à un panier de devise) ?

La monnaie « ECO » arrimée à un panier de devises (dollar, euro, yuan, yen et livre-sterling) avec un régime de change flexible à l’échelle de la CEDEAO demeure le cadre le plus adapté pour notre situation économique. Les pays de l’espace CEDEAO sont exposés à des chocs externes très récurrents, ce qui dénote leur niveau de vulnérabilité macroéconomique très élevé. Ce régime de change flexible a principalement deux vertus : l’autonomie de la politique monétaire et l’ajustement automatique aux chocs.

DCM : Pensez-vous que les critères de convergence définis par la CEDEAO sont atteignables pour ses pays membres dans le court et moyen terme ?

Les critères de convergence macroéconomique peuvent être respectés par tous les pays de la CEDEAO sur le moyen terme. Une intégration économique est un processus par lequel plusieurs nations s’accordent pour faciliter les échanges entre elles, afin d’unifier progressivement leurs marchés et d’en tirer des avantages mutuels. Le respect de ces critères est salutaire mais ne devrait pas être considéré comme une condition sine qua non pour la création d’une union monétaire crédible au sein de l’espace CEDEAO. Tous les pays qui se lancent dans une politique d’intégration économique visent un but politique : la consolidation d’un système socio-économique donné.

Propos recueillis par Mme Khady Niang Diop, Directrice de la Communication et du Marketing de l’Ugb et ses collaborateurs.

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Guédiawaye : Ahmed Aïdara retire à GFC son stade, Lat Diop annonce une plainte

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Dans une correspondance adressée à Lat Diop, président de GFC et responsable local de Benno, le maire Yewwi de Guédiawaye, Ahmed Aïdara, annonce la suspension «pour un temps» de la convention dans le cadre duquel la mairie met à la disposition du club le stade Ibrahima Boye. Celle-ci a été signée sous le magistère de son prédécesseur, Aliou Sall.

D’après Les Echos, Ahmed Aïdara a invoqué «un déficit budgétaire criard». Ainsi, renseigne le journal, GFC a jusqu’au 1er octobre prochain à 18 heures pour vider les lieux. L’édile de Guédiawaye offre cependant la possibilité de renouveler la convention «dans d’autres circonstances particulières qui seront définies d’accord parties».

Les Echos rapporte que Lat Diop ne l’entend pas de cette oreille. «Il veut nous retirer le stade que Aliou Sall avait mis à notre disposition sur la base d’une convention de quatre ans, en contrepartie de l’appui financier que la ville devait octroyer à GFC. Il ne sait même pas qu’il ne peut dénoncer une convention de façon unilatérale», souligne le président du club de football.

Ce dernier informe que les avocats de GFC vont saisir la justice et que le Comité exécutif du club va se réunir ce mercredi avant de faire face à la presse demain, jeudi.

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Lenteurs au Port autonome de Dakar: Le Dg Aboubacar Sadikh Bèye explique

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Les lenteurs au niveau du Port autonome de Dakar ont été décriées pendant la réunion présidentielle sur la cherté de la vie.  Mais pour le directeur général de cette structure,  cela s’explique  par une situation conjoncturelle. En effet Aboubacar Sadikh Beye a expliqué l’indisponibilité de certains quais entrave  l’offre portuaire. Sur 23 postes, les huits sont immobilisés. Par exemple, au mole 1,  deux postes sont au service du pétrole et du gaz pour la plateforme Tortue et Sangomar. Le bateau hôpital occupe aussi un poste au Port autonome de Dakar. Deux autres postes sont mobilisés pour être modernisés et seront récupérés en octobre.

  Le directeur général du Port d’ajoute que ces lenteurs s’expliquent aussi par un atre facteur lié à la forte portuaire. « En juillet on a fait 104% en importation. La congestion terrestre est réglée parce que les camions sortent très tôt du Port  alors qu’ils pouvait y faire plus de 4 jours ».  S’agissant de la manutention, un bateau de 40 000 tonnes reste à  quai pendant 20 jours parce que les manutentionnaires font 2000 tonnes par jour. « La manutention se fait encore comme il y a 40 ans. Il faut une modernisation. Il ajoute que les concessionnaires et les lignes maritimes sont aussi dans le Port et occupent de grandes surfaces », conclut-il.

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Lutte contre le trafic illicite à Thiès : Une contrevaleur de 437 millions FCfa de produits prohibés incinérés

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La Douane de Thiès a procédé à l’incinération de produits prohibés d’une contrevaleur de 437 millions de francs CFA.

Les produits prohibés saisis en 2021, dans le cadre des opérations de « bouclage » des couloirs et réseaux de trafic illicite, sont composés de faux médicaments vétérinaires d’une contrevaleur de 175 259 382 francs CFA ; de 3529 kg de chanvre indien pour une contrevaleur de 236 940 000 francs CFA ; de sachets en plastique pour une contrevaleur de 25 000 000 francs CFA.

L’adjointe au Gouverneur de Thiès, Mme Tening Faye Ba, a supervisé la cérémonie d’incinération en présence des représentants des autres Forces de Défense et de Sécurité, du corps médical et des services en charge de l’environnement.

Le Lieutenant-Colonel Amadou Lamine Sarr, Chef du Groupement polyvalent de Recherche et de répression de la fraude a rappelé la dangerosité des produits incinérés sur la santé de la population.

Il a affirmé une fois de plus l’engagement de son unité à combattre farouchement le trafic illicite sur toutes ses formes conformément aux directives de la Direction générale des Douanes, le DG en particulier. 

L’Adjointe au Gouverneur, Tening Faye Ba, a ensuite, invité les populations, celles du littoral plus précisément, à une collaboration plus étroite avec les forces de défense et de sécurité. 

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